Assurance de responsabilité / Suspension pour non-paiement / Ouverture du chantier durant cette période
Cass. Civ. I : 23.3.04
L'assurance obligatoire de responsabilité décennale fonctionne selon le système de la capitalisation. De ce fait, la garantie est acquise dès lors que les travaux ont fait l'objet d'une ouverture de chantier pendant la période de validité du contrat d'assurance et elle reste valable pendant le délai décennal, et ce quel que soit le devenir du contrat.
L'originalité de l'arrêt vient de ce que, jusqu'à ce jour, les arrêts portaient sur des chantiers ouverts avant la souscription ou après la résiliation du contrat d'assurance, tandis qu'ici le contrat fait simplement l'objet d'une mesure de suspension pour défaut de paiement des primes.
En l'espèce, un entrepreneur voit son assurance en responsabilité décennale suspendue en raison du non-paiement de ses primes. Durant cette période, l'entrepreneur informe son assureur de l'ouverture d'un nouveau chantier, mais ce n'est que quelques jours plus tard qu'il règle ses arriérés et se trouve de nouveau assuré. Après réception, un désordre de nature décennale survient et le maître de l'ouvrage assigne en responsabilité son constructeur, lequel se retourne vers son assureur.
Ce dernier lui dénie tout droit à garantie au motif que le chantier a été ouvert durant une période de non validité de la police.
La Cour de cassation rejette le pourvoi formé par l'entrepreneur et énonce que " la Cour d'appel ayant constaté qu'à la date de la déclaration d'ouverture du chantier litigieux, le contrat conclu entre la MAAF et l'entreprise L. se trouvait suspendu en raison du non-paiement de primes par l'assuré, a exactement déduit que l'assureur, peu importe que le sinistre soit intervenu pendant une période où le contrat était à nouveau en vigueur, n'était pas tenu à garantie ".
Il ressort clairement de l'arrêt que la période de suspension du contrat constitue une période de non validité de la police et que l'éventuel règlement ultérieur des primes ne fait reprendre au contrat ses effets que pour l'avenir.
En pratique, il est à craindre que des professionnels du bâtiment ne pensent être couverts par leur contrat d'assurance et ne découvrent, à l'occasion d'un litige, que ce n'est pas le cas. Ceci est d'autant plus malheureux qu'un simple avenant, au moment du règlement des arriérés, permettrait de donner un effet rétroactif à la police afin qu'elle couvre les chantiers ouverts durant la période de suspension.
On ajoutera que dans ce type de situation, pourrait une nouvelle fois se poser la question de l'information du maître de l'ouvrage, lequel risque de subir un préjudice du fait de l'absence de garantie s'il se trouve face à un entrepreneur insolvable.